Mes chers amiꞏeꞏs,

Ce que nous vivons depuis la mort tragique de Nahel mardi matin est humainement éprouvant et politiquement inédit. * * Je vous propose que nous débutions ce moment d’échange et de réflexion sur l’actualité  des derniers jours par un moment de recueillement.  Pour Nahel, pour sa maman, pour sa grand-mère, pour ses amiꞏeꞏs et ses proches, pour celles et ceux qui s’identifient à lui, partageons ensemble 1 minute de silence.

… Je vous remercie.

Enterrer son fils,  son petit-fils, est en soi un immense malheur, que personne ne devrait avoir à connaître. Nous partageons leur peine, autant que nous le pouvons.  Enterrer son fils, son petit-fils, à cause d’une injustice, rend les choses encore plus difficiles.

Et lorsque cette injustice est commise par un homme qui était censé vous protéger, qui est censé représenter l’ordre, la paix, comme l’indiquent les expressions “maintien de l’ordre” et “gardien de la paix”, alors au drame individuel s’ajoute un enjeu politique.

Avec les organisateurs de ce Conseil fédéral, nous avons souhaité prendre  le temps de ce discours pour que l’on pose, ensemble, les questions politiques qu’un tel drame soulève. 24 heures après la mort de Nahel, Emmanuel Macron s’est exprimé pour dire que c’était “inexplicable et inexcusable”.

Nous, écologistes, ne sommes pas d’accord. Si la mort de Nahel est effectivement inexcusable, elle est par contre loin d’être inexplicable.

Elle s’inscrit de fait dans un continuum. Un continuum de violences policières disproportionnées. Un continuum  de racisme dont il est quasiment tabou de parler. Un continuum de fonctionnement corporatiste de la police qui s’oppose bien souvent ou ralenti l’émergence de la vérité. Une entrave, dans le jargon.

 

Vous connaissez l’histoire du 17 octobre 1961.

Des Algériens furent tués par balle  afin de stopper leur manifestation pacifique, préparée en secret, qui constituait de fait un boycott du couvre-feu nouvellement appliqué aux seuls Algériens, dans un contexte de guerre d’indépendance algérienne.

De nombreuses victimes sont mortes sous les coups de “bidule” portés par les agents, parfois après leur arrestation, des dizaines d’autres furent jetés dans la Seine, plusieurs périrent par étouffement après avoir été jetés à terre et recouverts par des amas de corps.

Même Roger Wuillaume, inspecteur général de l’administration choisit pour écrire un rapport dilatoire – je rappelle qu’en mars 1955, il avait suggéré que la police judiciaire d’Algérie soit autorisée à utiliser certaines tortures, en particulier celles avec un « tuyau d’eau et de l’électricité » – même lui dut convenir à demi-mots du caractère inédit de cette répression.

Aucun policier engagé le 17 octobre n’a été relevé de ses fonctions, ils ont repris leur job, comme si de rien n’était.

Et seule une petite minorité des Algériens blessés furent transportés à l’hôpital.

Vous connaissez l’histoire de Malika Yazid, 8 ans.

Le 24 juin 1973, cités de transit des Groux à Fresnes, des gendarmes cherchent un Algérien de 14 ans, son frère Idira, déjà envoyé en hôpital psychiatrique pour vol de mobylette.

Malika, qui jouait en bas de l’immeuble, court dans la chambre pour le prévenir que la police le recherche.

Des gendarmes entrent alors dans l’appartement. L’un d’eux met une gifle à Malika, l’emmène dans sa chambre et ferme la porte pour l’interroger.

Elle en ressort dans le coma puis meurt.

 

Vous connaissez l’histoire de Malik Oussekine.

Jeune étudiant de 22 ans de l’École supérieure des professions immobilières. Il décède le 6 décembre 1986 d’un arrêt cardiaque provoqué par les coups de matraques qui lui ont été portés par deux agents des forces de l’ordre.

Seul témoin direct de la scène à l’époque : Paul Bayzelon. Fonctionnaire au ministère des Finances et résidant au 20 rue Monsieur le Prince, au coeur du Quartier latin, décrit ainsi les faits :

« Je rentrais chez moi. Au moment de refermer la porte après avoir composé le code, je vois le visage affolé d’un jeune homme. Je le fais passer et je veux refermer la porte(…). Deux policiers s’engouffrent dans le hall, se précipitent sur le type réfugié au fond et le frappent avec une violence incroyable. Il est tombé, ils ont continué à frapper à coups de matraque et de pieds dans le ventre et dans le dos. La victime se contentait de crier : « je n’ai rien fait, je n’ai rien fait« .

 

Vous connaissez l’histoire d’Adama Traoré.

Sept ans après, la Défenseure des droits Claire Hédon vient de rendre son verdict, ce lundi. Elle recommande que des poursuites disciplinaires soient engagées à l’encontre des gendarmes qui ont procédé à son interpellation en juillet 2016, ainsi qu’à un gendarme qui était en charge de la coordination des secours. Il leur est reproché d’avoir « manqué à leur devoir de protection » en n’ayant « pas pris le soin de préparer et de faciliter l’arrivée des pompiers ». Les causes de ses blessures ne sont pas évoquées dans ce rapport mais la reconnaissance du manque de secours est un pas supplémentaire vers la vérité, qui en appellera sûrement d’autres.

 

Nous connaissons ces histoires et nous en connaissons malheureusement bien d’autres. Et je n’oublie pas celles dont on ne parle pas, faute d’images et d’intérêt de notre société pour ces abandonnés de la République.

Acceptons dès lors un constat simple : la mort de Nahel n’est pas un drame isolé qui n’impliquerait que la responsabilité d’un unique policier. Acceptons dès lors une conséquence simple : les poursuites et sanctions contre le policier en question et les appels au calme ne suffiront pas.

Tant que ces problèmes structurels de rapport entre la police et la population, de racisme systémique, de manque de transparence, d’inégalités criantes, de reconnaissance du poids de la colonisation dont nous sommes encore loin de mesurer toutes les conséquences malgré les indépendances, ne seront pas posés, débattus et solutionnés collectivement, il n’y aura pas de justice, pas de vérité et donc pas de paix.

Ce drame, qui n’est pas le premier et, si les bonnes réformes structurantes ne sont pas pensées et mises en œuvre, ne sera pas le dernier, intervient dans un contexte politique que vous connaissez.

En 2017, sous le gouvernement Cazeneuve, le Parlement a adopté une loi qui créait l’article L.435-1 du code de sécurité intérieure.

L’objectif d’alors était d’encadrer l’usage de la force létale pour la police et la gendarmerie. A l’époque, les députés écologistes,  dont Sergio Coronado que je vois ici, mais aussi André Chassaigne chez les communistes et Pouria Amirshahi,  avaient voté contre.

Ils avaient alerté sur les dérives probables que ce texte engendrerait. Malheureusement, ils avaient raison.  Malheureusement, ils n’ont pas été écoutés. Pire, cette mesure floue a été adoptée, appliquée de manière biaisée par une circulaire adressée aux policiers.

Les conséquences en ont été renseignées par des chercheurs indépendants. Le politologue Sébastien Roché a par exemple établi que depuis l’entrée en vigueur de cette disposition, on a enregistré 39% de tirs de policiers en plus.

Et surtout 5 fois plus de personnes tuées. 5 fois plus.

Ces deux chiffres démontrent bien que la façon d’effectuer les tirs a évolué. 16 personnes ont été tuées par des tirs sur des refus d’obtempérer depuis 18 mois en France. En Allemagne, sur les dix dernières années, il n’y a eu qu’un mort pour le même motif.

 

Donc oui on doit le dire simplement, et c’est le premier problème politique que pose ce drame : nous avons un problème en France avec la façon dont sont gérés les refus d’obtempérer.

Nous l’avons dit, redit, les députés écologistes ont même déposé une proposition de loi à ce sujet en décembre.

Et 16 personnes tuées par des policiers (dont parfois une passagère) en 18 mois ce n’est pas un petit problème. Ni un détail. Ni une statistique. C’est bien notre contrat social qui est profondément attaqué quand ceux qui ont le mandat de nous protéger font l’inverse.

Sur ce point, donc, les choses sont claires : la loi va devoir changer. La loi va devoir changer, sur ce point et sur d’autres. Nous le savons, tout le monde l’a compris. Même ceux qui ne le souhaitaient pas jusqu’ici au gouvernement.

Les syndicats majoritaires de policiers aussi l’ont compris.

Je pense que ce n’est pas l’unique explication mais que c’est en riposte à ce sentiment de perdre la main sur une disposition qu’ils ont inspirée, portée et qu’ils protègent depuis sans en démordre, qu’ils ont décidé hier de rédiger le communiqué inacceptable dont vous avez peut être pris connaissance hier après-midi.

Un communiqué du syndicat Alliance / UNSA police qui emploie les mots suivants pour parler des jeunes, souvent des enfants, qui sont dans la rue depuis mercredi : “hordes sauvages”, “nuisibles”, j’en passe. Comment voulez-vous que la confiance s’améliore dans ce cas.

Ils disent aussi noir sur blanc qu’ils vont rentrer en “résistance”. Bref, un appel à la guerre civile. Rappelons que ce groupement syndical a réalisé en 2022 le score de 49,5% lors des dernières élections professionnelles.

Les mots et le ton révèlent clairement que si ce sont eux les représentants majoritaires de la police, il y a un problème systémique.

Et ça a le mérite de clarifier qui est ou non dans le champ républicain.

Le deuxième problème que nous avons, et que notre société a toujours eu du mal à adresser, c’est le racisme !

Les personnes qui meurent suite à des refus d’obtempérer sont quasiment toujours des personnes racisées. Les statistiques précises n’existent pas. Mais si on fait une recherche des cas renseignés dans la presse, ce que la commission anti-racisme d’EELV a pris le temps de faire, et je tiens à les en remercier, c’est le constat que l’on fait.

Oui, il y a un problème de racisme dans la police.

Nier cette réalité, se cacher systématiquement derrière des comportements individuels, est une forme de négation du politique.

Oui, il y a un problème de racisme dans la police. Cela ne veut pas dire que tous les  policiers sont racistes, évidemment. Mais il y a bien un problème de racisme dans la police.

Oui je viens de le répéter 3 fois en 30 secondes, et il va falloir vous y habituer parce que nous continuerons à le dire tant que ce sera le cas, que cela plaise, ou non.

On va continuer à le dire parce que cela a été démontré maintes et maintes fois : les jeunes racisés sont davantage les cibles de contrôles intempestifs, souvent injustifiés.

Rappelons cette statistique : un homme a 10 à 20 fois plus de chances de se faire contrôler s’il est racisé que s’il a la peau blanche.

Et ce dès le collège.

Contrôles qui par ailleurs se passent mal, beaucoup trop souvent : utilisation du tutoiement, humiliations inutiles. Comment voulez-vous que cette jeunesse ait confiance dans la police ?

Certains nous répondent que de dire cela, c’est être anti-flics. Je pense au contraire que c’est être lucide et s’attaquer de front au problème pour le résoudre plutôt que de le laisser pourrir ou plutôt prospérer comme c’est le cas depuis des années.

On nous renvoie aussi que la police est une institution mixte, donc qu’elle ne peut être raciste. Oui, la mixité progresse dans les rangs de la police, c’est vrai. Mais cela ne protège pas cette institution du racisme, loin de là.

On se souvient d’échanges sur des messageries instantanées internes à la profession, qui avaient fuitées et démontraient toute l’ampleur du racisme que subissent au quotidien certains policiers racisés.

 

Comme nous l’avons toujours fait, nous continuerons de leur apporter notre soutien. Comme à toutes celles et ceux qui subissent des discriminations au quotidien, d’ailleurs !

Le troisième problème politique posé par ce drame tient à la nature du débat public. Et il est double.

Déjà, comment expliquer qu’après la mort violente d’un enfant il ne soit pas possible de dialoguer,  d’avoir un moment d’unité, d’empathie, de communion, de reconnaissance de la souffrance ?

Il faut mesurer ce que cela contient de danger que d’être incapable d’y parvenir.

J’étais avant hier à Nanterre pour la marche blanche en hommage à Nahel, avec Sabrina Sebaihi, députée de la circonscription de Nanterre, avec nos élus municipaux de Nanterre, Francesca Pasquini, députée de la circonscription voisine d’Asnières, Patrick Chaimovitch, maire de la commune voisine de Colombes, et de très nombreux autres éluꞏes EELV.

Nous avons pu voir l’immense dignité de la foule qui marchait. Et j’ai pu mesurer l’intensité de l’incompréhension et de la colère.

La foule était composée de femmes et d’hommes, de toutes les générations, de tous les âges.

Cette colère se révèle face à cette injustice particulière. Et ça aussi il va falloir le dire, le répéter, jusqu’à ce que les conséquences en soient tirées et les solutions trouvées. Cette colère plonge ses racines dans des décennies d’abandon et de mépris.

Oui, cette colère est légitime. Et pourtant, les responsables politiques qui sont au pouvoir, ne sont pas capables aujourd’hui d’organiser les conditions du recueillement collectif.

Eric Dupond Moretti et Gérald Darmanin ont par exemple dit appeler à l’apaisement… pour dans la phrase d’après jeter de l’huile sur le feu en accusant leurs opposants politiques d’être complices ou co-responsables des violences et dégradations. Dans le même temps,

ils refusent toute possibilité de compréhension de la colère et de la souffrance de la jeunesse, et plus largement, de quartiers entiers, qui ont été abandonnés.

Nous, nous le disons depuis le début : le calme ne se décrète pas, il se construit. Nous y prendrons toute notre part, avec responsabilité pour obtenir le calme, et détermination pour exiger des réponses politiques. L’un n’ira pas sans l’autre, d’ailleurs.

Mais, et c’est un autre problème dans le débat public, nous n’avons pas la possibilité ne serait-ce que de poser les problèmes auxquels nous sommes confrontés sans être caricaturés. Les débats sérieux ont du mal à pouvoir être posés et menés dans ce pays. Nous le déplorons. C’est une profonde crise démocratique que nous traversons.

Lorsque l’on dit par exemple depuis des mois, voire des années, que l’on devrait collectivement, dans le calme et la rationalité, prendre le temps d’examiner les questions de doctrine de maintien de l’ordre, qu’on devrait questionner la loi de 2017, ce que d’ailleurs reconnaît toute la presse étrangère, alors que nous renvoie-t-on ?

Lorsqu’on dit qu’il faut beaucoup plus de formations initiales et continues pour les policiers car aujourd’hui ils n’ont pas les moyens de mener à bien leur mission, lorsqu’on insiste sur le fait que la désescalade ça s’apprend comme de nombreux pays voisins le font, lorsqu’on pense que des solutions concrètes et simples existent comme les caméras piétons, les récépissés de contrôle d’identité, oui lorsque nous posons ces questions, que nous répond-on ?

Qu’on détesterait la police, voire même certains osent dire, qu’on voudrait “casser du flic”. La caricature permanente de son opposition politique ne peut rien apporter de bon.

Ce que demandent les écologistes est simple : c’est la désescalade.

Concrètement qu’est-ce que cela signifie ?

Il ne s’agit pas de justifier la façon dont cette colère s’exprime : casser des services publics n’est pas acceptable, casser quoi que ce soit d’ailleurs, nous l’avons toujours dit, nous qui avons toujours prôné la non-violence, en toute circonstance, et sommes adeptes de la désobéissance civile.

Mais oui il faut reconnaître que cette colère et cette souffrance sont légitimes. Et qu’il nous faut analyser, discuter, débattre, des causes de cette crise.

Nous ne pensons pas que c’est uniquement en multipliant le nombre de policiers dans la rue qu’on résoudra cet immense problème de société. C’est nécessaire mais pas suffisant. Et ce n’est d’ailleurs pas leur rendre service. Chacun se rend d’ailleurs bien compte depuis plusieurs nuits à quel point cela les expose d’ailleurs, en première ligne, à des risques réels.

Je voudrais d’ailleurs que nous ayons aussi une pensée pour les sapeurs-pompiers, les agents publics, les journalistes, les policiers et les citoyens blessés ces derniers jours.

Une pensée aussi pour tous les commerçants qui ont été touchés, et dont les commerces pour certains, on le sait, ne redémarreront jamais. Nous demandons d’ailleurs au gouvernement de leur débloquer des aides en urgence et en conséquence.

Une pensée aussi, évidemment et même si on en parle très peu dans la presse, pour les deux personnes mortes hier, la première à Cayenne en Guyane, et la seconde à Petit Quevilly en Normandie.

Je voulais aussi, évidemment, adresser un gros message de soutien aux élus locaux des villes concernées, qui se retrouvent depuis plusieurs nuits en première ligne.

Depuis des années, ils et elles se battent pour proposer à leurs concitoyens des établissements et des services publics de qualité. Et voient depuis trois nuits ce travail littéralement partir en fumée.

 

Tout cela est un immense gâchis.

Beaucoup d’entre eux ont passé une partie de la nuit sur le terrain, à tenter de garantir la sécurité des personnes, des biens et en particulier des services publics. Plusieurs d’entre eux ont vu leur mairie saccagée ou brûlée,  comme Christian Métairie dont la mairie d’Arcueil a été dévastée.

A Colombes, à Lyon et dans sa métropole, Strasbourg, Grenoble, Poitiers, Besançon, Bordeaux, Tours, nous pourrions aussi citer toutes les villes où nous avons des élu.es écologistes, ils et elles font tout ce qu’ils peuvent, mais, rappelons-le, le maintien de l’ordre n’est pas de leur responsabilité, elle est celle de l’Etat !

Nos parlementaires font aussi un travail incroyable, on entendra Sabrina Sebaihi, députée de la circonscription dans laquelle habitait Nahel. Elle est sur le terrain nuit et jour depuis mercredi, soutenant toutes celles et ceux qu’elle peut aider, avec aussi Francesca Pasquini, députée de la circonscription voisine.

Les écologistes sont depuis mercredi sur le terrain aux côtés des populations, de toutes les populations.

 

Mais ces violences, aussi condamnables qu’elles soient, ne doivent pas nous imposer l’économie de prendre du recul, de réfléchir, car c’est aussi notre responsabilité de politiques.

Et c’est une question éminemment politique que de comprendre ce que dit cette violence.

Et je m’opposerai toujours à cette phrase de celui qui pourrait concourir au prix du politique le plus irresponsable et qui disait, certes dans un autre domaine, “expliquer c’est déjà un peu vouloir excuser” (vous l’avez reconnu ? Je suis sûre qu’il vous avait manqué : il s’agit de Manuel Valls).

Non, expliquer et excuser ça n’est pas la même chose, et oui les mots ont un sens. Si vous n’expliquez pas les choses, comment voulez-vous les comprendre, les prévenir et les empêcher ?

On a raison de rappeler que ce sont des services publics qui sont utilisés par les plus défavorisés qui sont dévastés. Des services essentiels ou encore des bureaux d’élus (celui de la Présidente de notre Conseil fédéral l’a par exemple été dans la nuit de jeudi à vendredi), des élu.es, qui ne comptent pas leurs heures, leur engagement.

Des agents des services publics qui sont effrayés ou dégoûtés, on les comprend aussi quand on connaît la difficulté de leur tâche quotidienne.

On ne peut pas accepter cela. Et on le condamne, comme on a toujours condamné les violences et les destructions.

Évidemment que nous appelons au calme. Même si nous partageons la colère. Nous appelons au calme, mais nous devons trouver les voies pour comprendre.

Et puis il y a un quatrième problème politique, sur lequel nous n’avons pas entendu un mot du gouvernement depuis 4 jours.

C’est l’immense abandon depuis des décennies dans lequel vivent des millions de Français des quartiers les plus défavorisés.

On les appelle souvent les Quartiers Prioritaires de la Politique de la Ville. Cette qualification a-t-elle encore un sens lorsqu’on sait à quel point les politiques de la ville ont été réduites à peau de chagrin ces dernières années. Les mairies, même lorsqu’elles sont bien intentionnées et se démènent, ont vu leur dotation de fonctionnement de l’Etat diminuer de façon drastique, réduisant, année après année, la possibilité de financer la présence et l’accompagnement dans les quartiers les plus difficiles. Il y a aussi des réussites, qui méritent d’être soulignées tant tout est fait pour les rendre impossibles. Sur ce sujet, nous avons besoin d’un grand débat public.

Avec comme préalable : que ce débat intègre ce que l’on a appris grâce aux chercheurs et aux penseurs de la pensée décoloniale. Et reconnaisse que la ségrégation existe en France.

Lutter contre les discriminations, investir massivement dans la construction et la rénovation des logements, en priorité ceux des quartiers difficiles – rappelons que seulement 7% des logements sociaux ont pu bénéficier d’une rénovation thermique depuis le Grenelle de l’environnement en 2007, il y a 15 ans, développer prioritairement les transports en commun dans les quartiers les plus défavorisés pour les désenclaver, construire des espaces verts, maintenir et développer les services publics de proximité, repenser l’accès aux soins en créant des maisons de santé pluridisciplinaires et en réorganisant la médecine de ville.

Nous devons augmenter la part du budget dédié à l’accompagnement humain de la politique de la ville, y compris dans les budgets de l’ANRU pour accompagner les initiatives et les projets, notamment d’éducation populaire, qui fourmillent dans les quartiers populaires et sont portés par leurs habitantꞏes. Et puis fixer une priorité parmi les priorités : l’école.

Nous connaissons l’ampleur de cette tâche. Les maires écologistes y travaillent tous les jours mais leur effort local ne saurait suffire. Le pays tout entier doit s’approprier cet enjeu. Nous ne répondrons pas, et ce sera long, à la crise profonde, sans un investissement massif dans l’école, qui est seule à même de faire revivre l’égalité des chances, fondement de notre pacte social. En conclusion, la crise que nous vivons a des racines profondes et anciennes.

Nous, écologistes, devons porter une voix singulière, ce que nous avons fait depuis quelques jours. Et c’est ce que nous continuerons à faire. Avec nos éluꞏes locaux et nos parlementaires, notre parti politique assumera son rôle de parti politique, grâce à vous toutes et tous.

Nous continuerons à être concrets dans les solutions que nous proposons car le travail des écologistes sur le terrain, dans les assemblées, les commissions du parti, nous mettent aujourd’hui en position de partager des réponses précises aux immenses problèmes que révèle la crise actuelle. Et nous serons à la disposition de celles et ceux qui souhaitent y travailler pour le faire en commun.

J’avais prévu aujourd’hui de vous parler des Etats généraux de l’écologie, du rapport du haut conseil pour le climat, de la dissolution des Soulèvements de la terre, de la criminalisation du mouvement écologiste, mais je pense qu’il fallait prendre le temps de se concentrer plutôt sur l’actualité grave et inédite que traverse notre pays, et qui nécessitera d’ailleurs bien d’autres échanges entre nous, aux journées d’été et dans tous les espaces que vous souhaiterez.

J’ai également été moins longue que d’habitude car je souhaitais que puissent également prendre la parole, et je leur demande de monter sur scène : Sabrina Sebahi députée de la 4ème circonscription des Hauts-de-Seine, Patrick Chaimovitch, maire de Colombes, Christian Metairie, maire d’Arcueil et Amine Kessaci, de l’associaiton Conscience.

01/07/2023, 16:08