Emmanuelle Cosse, refuse de jouer les pots de fleurs et appelle les médias audiovisuels à jouer pleinement leur rôle d’agora moderne dans la vie démocratique, en organisant un débat avec l’ensemble des candidats à la région.
Lu dans Libération
http://www.liberation.fr/debats/2015/10/28/regionales-l-ile-de-france-merite-un-debat_1409461
Je préfère dire les choses franchement : ce n’est pas par ce que je suis écologiste que j’ai envie de jouer les pots de fleurs. Ma conception de la politique est celle d’une confrontation d’idées, de valeurs et de propositions. Ce n’est qu’à travers un débat que les électeurs peuvent réellement évaluer ce que les candidats proposent et faire leur choix en connaissance de cause.
Or, force est de constater qu’à l’approche des régionales, il est très difficile d’obtenir des débats dignes de ce nom. La tentation est grande de vouloir réduire le match politique à un duel gauche – droite. Pis, les candidats traditionnels préfèrent souvent fuir le débat et rester bien au chaud, pour ne pas se mettre en danger.
C’est ainsi qu’en Île-de-France, plusieurs débats, proposés par différents médias, ont été annulés faute de «combattants», et notamment parce que Claude Bartolone, le candidat socialiste, a refusé de se confronter aux écologistes ou aux communistes. Comme si le pluralisme n’était pas une chance pour la gauche, contrairement au monolithisme à la droite de plus en plus populiste et caricaturale menée par Valérie Pécresse !
Cet échange, je le demande, car l’Ile-de-France mérite un débat. Dans un mois, près de 7 millions de Franciliennes et Franciliens sont appelés à voter pour les élections régionales. Ce scrutin est majeur car c’est à l’échelle régionale que se décident les grandes orientations du territoire : le développement de ses transports en commun, la gestion de ses lycées, l’orientation de son développement économique, de sa politique agricole et énergétique…
Le mois de décembre 2015 sera en outre marqué par la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP21), qui se tiendra au Bourget au même moment. Cette conjonction des calendriers fait écho à l’un des principes fondateurs de l’écologie, c’est-à-dire l’importance de «penser global et d’agir local». Voilà de quoi faire se confronter les visions du monde et les convictions des uns et des autres ! Quelle belle opportunité pour proposer un avenir à la région Ile-de-France et redéfinir son rôle dans le monde. Doit-elle rester une gigantesque machine à croissance ou va-t-elle enfin se tourner vers ses habitants, les mieux à même d’assurer son rayonnement ?
La qualité du débat politique est, depuis l’Antiquité, un prérequis incontournable à toute vie démocratique. Un débat confiné ou esquivé est la voie la plus courte vers la démagogie. Celle-ci menace, gangrène et anesthésie l’audace des responsables politiques qui trouvent trop souvent refuge derrière des postures aseptisées et technocratiques. Le moment d’incertitude que nous vivons collectivement exige d’avoir le courage de réhabiliter ce qui fait la noblesse de la politique : le débat d’idées.
J’appelle donc les médias audiovisuels à jouer pleinement leur rôle d’agora moderne dans la vie démocratique, en organisant un tel débat avec l’ensemble des candidats. Et ceux-ci, à s’emparer de cette belle occasion de faire de la politique comme elle doit se faire en démocratie: ensemble, projets contre projets, devant les citoyens.
Pour ma part, j’y suis prête.
Emmanuelle Cosse Secrétaire nationale d’Europe Ecologie – les Verts (EE-LV)